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"13 cent millions de Chinois et moi, et moi, et moi..." - Jacques Dutronc
Après avoir finalement surpassé le choc de leur façon de conduire, j'ai pu enfin me concentrer sur ce qu'il y a de plus intéressant en Chine, et j'ai nommé... les Chinois.
Ils sont absolument adorables, il faut bien l'avouer et intensément attachants. En tant que peuple, ils sont éblouissants de paradoxes. En tant qu'individus, on gagne pratiquement toujours à les découvrir. Ils sont ouverts et curieux par nature. Le respect prend une importance capitale dans tout ce qu'ils font. Qu'ils prennent avec les deux mains un simple objet insignifiant (comme un exercice de français, par exemple) ou qu'ils te "garochent" tes papiers ou ton change sur le comptoir, la forme de respect qu'ils te portent sera toujours clairement démontrée par leurs gestes. Les Chinois sont passés maîtres dans l'art du langage corporel et leurs yeux en amandes sont de véritables livres ouverts.
De par leur nombre, j'ai parfois l'impression d'avancer dans une mer de Chinois. Une mer où je détonne par ma différence. Les regards que je rencontre restent souvent accrochés sur mes traits occidentaux. Tantôt curieux, tantôt haineux, tantôt envieux, leurs yeux me regardent et me disent que je suis une étrangère. Je ne me suis jamais sentie aussi différente que dans ma ville. Ici, je suis une minorité visible.
Mais sitôt abordés, les Chinois sont apprivoisés. Aussitôt que la glace est rompue, elle est déjà entièrement fondue. Ils veulent te parler, te connaitre, tout savoir, malgré la
barrière des langues. Et puis, la barrière des langues n'existe plus, ils te 
connaissent, ils te parlent et te traitent comme une amie même si tu ne comprends pas ce qu'ils disent.
J'ai appris un mot que tout le monde peut comprendre. J'ai appris un mot qui ne connait pas de barrières.. qui les fait tomber toutes. Même pas besoin d'ouvrir la bouche pour le prononcer. Juste à en soulever gentiment les coins. C'est un mot silencieux qui vainc tout de sa puissance. Je le connais depuis toute petite. Je commence à peine à en comprendre la portée.
Un sourire ouvre toutes les portes, fait s'effondrer les murs et rassemble les peuples dans un langage commun de paix, d'amour et de pardon.
Parlez-le! Apprenez-le! C'est le mot le plus puissant du monde.
Après les Chinois, la deuxième merveille de Chine, c'est... la gastronomie chinoise.
Bien que la sécurité alimentaire fasse place à de nombreuses inquiétudes, la moindre sortie au restaurant est un plaisir inavouable, une découverte fabuleuse et, il faut bien se l'avouer, ... une grosse orgie de bouffe!
Qu'on mange de la fondue chinoise (qui n'a rien à voir avec ce qu'on connait au Québec) ou des plats à partager, l'abondance est de mise et le surplus nécessaire. Les Chinois ne supporteraient pas de voir tous les plats se vider. Cela signifierait qu'ils n'ont pas réussi à rassasier leurs invités. Ce serait la honte. Le gaspillage est, par conséquent, quasi inévitable. Mais qu'à cela ne tienne, tout est délicieux.
Lorsqu'on mange en groupe, les plats sont généralement déposés sur un plateau tournant au centre d'une énorme table ronde. Et tourne, et tourne en rond pour jouer de la baguette et saisir la bouchée qui te plait. La mini-assiette devant soi ne sert qu'en cas de nécessité pour une bouchée trop grosse ou une crevette à décortiquer. En général, les baguettes ne font qu'un saut du centre de la table jusqu'à la bouche sans se soucier de l'hygiène. Ici, la bienséance suit un tout autre code de déontologie que le nôtre, une logique bien à elle, tout aussi compliquée, mais totalement différente.
Pour ce qui est des plats qu'on y mange, tout est délicieux, tout est différent, rien n'est ennuyant. Pour une fille comme moi qui aime essayer toutes sortes de choses et qui (essaie) de ne pas se laisser impressioner par les apparences, la gastronomie chinoise est une aventure en soi. Pour bien vous raconter cette aventure, j'ai décidé de vous faire le top 5 des choses bizzares que j'ai mangé ici à date:
5- Parmi toute la gamme de fruits et légumes dont j'ignorais l'existence avant d'arriver en Chine et que je continue de découvrir, j'ai choisi de vous parler des champignons noirs asiatiques. Délicieux! J'en mange presque tous les jours. Ils font partie intégrante de l'alimentation du DongBei. J'en ai même acheté chez moi et j'en mets dans ma bouffe. On les achète séchés et on les fait tremper dans l'eau où ils gonflent de 3 à 4 fois leur volume. Ils ont une texture gélatineuse et une forme de fleur. Au début, je croyais que c'était une algue.
4- De l'intestin de vache. Oui, oui,
je savais très exactement ce que je mangeais avant de le mettre dans ma bouche. Ils ont pointé leurs intestins, ils ont fait "meuhh!". J'ai compris. J'ai goûté
pareil. C'était assez bon. Disons, pas pire. Assez pour que j'en reprenne une ou deux autres bouchées. Mais pas assez pour que je rêve d'en remanger.
3- Un doigt de poulet. Non, je ne parle pas d'un filet de poulet enrobé dans la panure chez St-Hubert. Je parle bel et bien d'un DOIGT de poulet. Genre, le bout de la patte avec une griffe dessus. Et oui, il n'y a qu'un os avec de la peau après ça. Mais que voulez-vous, les Chinois adorent gruger les p'tits os et, pour eux, tout se mange sur un animal, tous les organes internes, externes, la tête, la langue, les pattes, alouette!
2- Des vers à soie. J'en ai vu tout l'hiver au marché en bas de chez moi. Des beaux gros vers à soie, gros comme mon pouce. On m'avait dit que c'était savoureux. J'avoue que je trouvais ça bizzare et que je savais pas si j'aurais le courage d'y goûter si, un jour, l'occasion se présentait. L'occasion s'est présenté il y a deux semaines. De tous petits vers à soie, plus petits que mon p'tit orteil. J'en ai mangé deux ou trois, mais il manquait de viande. Légèrement décevant, mais mes étudiantes m'ont assuré que les gros sont réellement meilleurs. C'est à réessayer.
1- Des concombres de mer. Ah ça, par exemple, c'est toute une histoire! Dès ma première semaine en Chine, j'avais été invitée dans un restaurant extraordinaire où il n'y a pas de menu écrit, mais où on doit se lever pour aller choisir sa bouffe dans une immense pièce avec aquarium, alors qu'elle est (dans certains cas) encore vivante. Ce jour-là, j'avais vu la dite "bibitte" grouiller dans son aquarium et je m'étais fait une note personnelle de ne jamais mangé de cette affaire-là. Trois mois plus tard, au Nouvel An chinois, j'ai été invitée à une fête dans une famille chinoise (la même fête où j'ai mangé de l'intestin de vache). On m'a présenté un plat comme étant de délicieux fruits de mer. J'ai goûté et acquiessé. C'était réellement très très bon. Plus difficile à décrire que des intestins de vache, ma voisine de table, sur son iPhone, m'a trouvé la photo sur Internet. La même "esti de bibitte" dégueulasse. Mais à ce moment-là, mes papilles gustatives avaient été aussi bien informées que mes yeux, je me suis relaxée et j'en ai repris encore et encore. Et encore la semaine dernière au mariage de Coco parce que c'est tout simplement CRISSEMENT BON! (Meilleur que les intestins de vache)
Il me reste encore plein d'affaires à goûter avant de partir d'ici. Peut-être des têtes de canards, des langues de chiens ou quoi encore?!
Au marché, quand ils débitent un cochon, la tête est exposée en avant-plan. Au début, je croyais que c'était purement décoratif, pour montrer que c'était un beau gros cochon gras. Mais, avec le temps, j'ai compris que, pour un Chinois, tout se mange sur un animal, et en Occident, on jette parfois le meilleur sans même y goûter.
N'allez pas croire qu'ils n'ont pas leurs petits dédains, eux aussi. Au jeu du détecteur de mensonges, un de mes étudiants a, à ma grande surprise, créé tout un émoi en affirmant avoir déjà mangé du chat. Tout le monde était dégoûté et fasciné. Manger du chien (d'élevage), oui! Mais du chat! Pas dans cette région de la Chine, en tout cas.
Bref, il me reste beaucoup de choses à apprendre des Chinois et ils n'ont pas fini de me fasciner.
Sur ce, je vous laisse avec quelques photos du mariage de Coco (ma collègue), où nous étions tous rassemblés, la semaine dernière, l'équipe de l'Alliance française de Shenyang. À table, il ne manque que Coco (mais on la voit derrière en robe rouge en train d'allumer des cigarettes et de récolter des enveloppes rouges et aussi sur la première photo avec son mari et ses parents) et moi, bien sûr, qui suit derrière la caméra.
tChine tChine !
..MFrance